Quatre mois se sont écoulés entre mon dernier article et celui-ci. J’étais motivée à écrire toutes les semaines puisque j’aime partager mes lectures et mes réflexions. Entre temps, j’ai commencé mon nouveau travail et celui-ci m’a pris beaucoup de temps. Puis, je n’ai plus eu l’envie d’écrire. J’ai bien écris quelques mots sur mon absence et puis je les ai effacé avant de reprendre et d’écrire un long texte.
C’est bizarre, normalement j’adore ça, écrire, mais, là, le désir de noter et de graver sur papier toutes mes pensées m’a totalement déserté. Je me suis retrouvée nue, un peu confuse. Je n’ai pas arrêté de lire cependant, juste… je me suis tue. J’ai repris l’écriture la semaine dernière, tâtonnant timidement, incertaine de ce que j’allais rédiger. Je sens, néanmoins, qu’elle est de nouveau entière et vit au fond de moi.
J’ai du mal à écrire vite, à m’organiser. J’ai quelques idées mais ne les tiens jamais jusqu’au bout. Finalement, je choisis toujours la tranquillité, la facilité, celle de la lecture. Ecrire m’épuise par moment. Mais là, cette envie de ne plus taper du clavier venait de ma vie professionnelle. Car je ne pourrais pas vendre ma plume – n’ayant aucun savoir pour tenter d’en vivre. Alors je suis devenue développeuse, une pro des algorithmes. Pas d’écriture dans ce métier – exception faite de la rédaction de document technique. Je me suis consacrée à mes ambitions professionnelles et ce que j’avais mis en place alentour – le permis. J’ai changé de boite, j’ai voulu m’intégrer. Je me suis intégrée. Maintenant, je me sens assez stable pour tenter de retrouver une routine qui me convienne. Mais je suis de celles qui doute, tout le temps. Je ne cesse de m’interroger sur tout et n’importe quoi.
Notamment au niveau de cette activité, l’écriture ; dois-je écrire dans mes carnets ? Mais je ne retranscris pas après. Où dois-je structurer mes pensées, noter des brouillons et terminer sur Word ? J’avoue, c’est ma question principale qui me hante depuis quelques mois, plusieurs années même. J’ai fait avec. J’ai même écrit mon premier long texte. Il ne me plait pas donc je ne le corrige pas, je ne le transcris pas. Finalement, je me concentre sur mes projets qui bouleverseront ma vie mais c’est une erreur. Finalement j’ai compartimenté sans inclure que mes projets faisaient partis de ma vie.
J’ai passé une seconde fois mon examen… je n’aurai pas pu faire plus catastrophique. Même si je n’avais pas fais deux erreurs éliminatoires – l’inspectrice est intervenue deux fois sans que je ne m’en rende compte – je ne l’aurai pas eu puisque j’ai eu 14 points. J’appelle ça un accident mais un gros, qui me servira de leçon et de déclencheur, j’espère. En tout cas, je me suis rappelée pourquoi je souhaitais tant l’obtenir, à 32 ans : parce que je désire un enfant et avoir le permis sera plus pratique pour tout. Simplement. Et j’ai oublié ce but. J’en ai eu un autre : celui de me sentir à la hauteur de la responsabilité de conduire toute seule sur la route. Or, j’ai peur. Je suis terrorisée. Même si les lignes et le bruit du moteur me bercent, que j’aime conduire, je suis paralysée à l’idée de faire une connerie. Et, comme la peur attire le danger, je m’y mets directement dans le danger, toute seule. Une calamité ce second examen. Et j’ai fais semblant que tout allait bien, que je le repasserai la prochaine fois, que ça serait la bonne. Un mantra qui m’a permis d’être dans le déni et de nier que je stressais. Un mantra où j’ai explosé ensuite, en larme, près de ma psy. Non, ça ne va pas. J’ai honte d’avoir eu un résultat aussi calamiteux, de ne pas avoir été assez lucide pour comprendre, en sortant de la voiture, que je n’aurais pas mon permis. Raison de plus pour désacraliser et détruire toute la portée symbolique qu’a le permis pour moi. Faire ses contrôles, prendre les bonnes décisions à temps, avoir confiance en sa capacité de jugement… Ouais, trois points qui ne m’ont pas été inculqué à la naissance ni entretenu dans mon adolescence.
Certainement pour ça que je me suis mise à lire, de nouveau, des romans jeunesses. Et j’y prends tellement de plaisir ! Depuis que j’ai découvert les sagesses et les analyses de Clémentine Beauvais dans son magnifique ouvrage Ecrire comme une abeille, je regarde la littérature jeunesse comme une production très précise et riche destiné à tous les enfants et adultes – qui ont besoin de soigner leur enfant intérieur. Alors je lis beaucoup de romans jeunesse, j’en admire le rythme, la conception, les interrogations. Je m’autorise à dire que j’aime ça. Parce que, quand je m’allonge sur mon canapé en me disant que c’est une bonne idée de regarder la grande librairie et de voir que ce sont tous des gens qui s’autoproclament érudits et qui se gaussent dans leur identité d’écrivain, donc très élitiste le truc, je me dis que non, décidément, je n’ai jamais eu cette philosophie de la hiérarchie de la parole. Donc je gueule beaucoup, ça me désespère cette émission. J’étais élitiste avant, je ne lisais que des classiques qui, au bilan de cet article, ne m’ont pas beaucoup apporté dans ma construction de femme et d’être humain, dans la construction de mon identité puis je me suis détachée de ces classiques que tous les écrivains médiatisés citent – car ils marquent une appartenance à une classe sociale très rigoureuse – pour lire des contemporains et des essais. Ce que je trouve le plus dur, c’est de voir que toutes les adolescentes s’arrachent les romances et les romans jeunesses qui aident à leur construction mais pas un mot dans les médias mainstream. Rien. Ils ne s’abaisseraient pas à dire quoi que ce soit sur cette nouvelle littérature qui deviendra, de plus en plus, une révolution. Qui l’est déjà puisque cette même littérature prend de plus en plus de place en librairie. Et j’adore voir cette évolution des mœurs et de la société se transformer. D’autres préfèrent rester figer.
Je me suis beaucoup égarée. A l’origine, je voulais simplement vous parler de mon absence et vous dire que je n’abandonnais pas le blog. J’aime écrire des articles et je n’abandonnerai pas cette activité, j’aime échanger avec par commentaire et cela me manque de l’avoir délaissé. Il faut que je trouve un nouveau rythme qui me convienne et qui puisse s’adapter à ma vie morcelée.
Je suis ravie de te lire et de te retrouver ici 🙂
Etant incapable de passer le permis qui est l’une de mes phobies, je te trouve très courageuse d’avoir passé l’examen malgré ta peur.
La littérature jeunesse est l’une des meilleures qui existent ! Je n’avais pas pensé que cela pouvait être une manière de soigner son enfant intérieur, je trouve ta réflexion très intéressante et juste, merci de l’avoir partagée. Quant au permis : je rejoins le commentaire d’Audrey. Passer le permis n’est vraiment pas une chose aisée (je ne l’ai pas non plus, même si nos situations ne sont pas forcément comparables, car cela m’angoisse). Passer l’examen est déjà très courageux, et j’espère que la prochaine fois sera la bonne. Au plaisir de découvrir tes articles et ton blog 🙂
J’avoue que je n’y avais pas pensé non plus avant de l’écrire mais, depuis ma sortie de dépression et pendant ma dépression j’ai lu énormément de littérature de jeunesse. J’ai constaté que je me sentais beaucoup mieux, que ça m’encourageait à assumer qui j’étais. C’est fou, une fois adulte on ne s’autorise pas le plaisir de la lecture, il faut toujours que ça soit le plus sérieux possible, le plus austère. Du coup, en ce moment, je lis énormément de littérature de jeunesse et j’essaie de compléter avec des essais. Merci beaucoup pour ton commentaire !
Honnêtement ? Je ne suis pas étonnée que la littérature jeunesse t’ait aidée. Comme tu le dis, la littérature adulte est très (trop) sérieuse, et dans le Young Adult il y a une plus grande place accordée aux émotions et aux jolis messages. Cest comme si cela nous reconnectait à nous-mêmes 😇
Je viens de terminer le premier roman édité par Elegy, The wilderness of girls et, qu’est-ce que j’aurai aimé l’avoir dans mes mains lorsque j’étais adolescente ! J’ai l’impression que la littérature de jeunesse et Young Adult sont très en avance sur certains sujets comparé à la littérature adulte.
Ca me rassure de savoir que je ne suis pas la seule à avoir peur… j’ai l’impression que c’est un chemin de croix pour celles et ceux qui ont peur lors de l’examen parce qu’une erreur d’inattention ou de concentration et c’est sûr que tu ne l’as pas. Merci beaucoup pour ton commentaire, il me fait chaud au coeur !
Que tes mots sont touchants ! Je suis triste pour ton permis, mais je suis certaine que tu vas y arriver…
Et j’ai 36 ans, je lis toujours de la littérature jeunesse, pourquoi arrêter d’en lire, lorsque la qualité est au rendez-vous, lorsque les sujets sont si bien traités ? Clairement pas de quoi avoir honte, au moins, nous lisons 😉
Merci beaucoup ! Je suis heureuse de savoir que mes mots peuvent toucher !
Je suis bien d’accord ! J’ai arrêté dans lire parce qu’inconsciemment, je me suis dis qu’une adulte ne devait pas lire ce genre, que c’était destiné aux enfants. D’ailleurs, dans l’essai La littérature de jeunesse, elle explique que la littérature de jeunesse est stigmatisée et ghettoïsée par les adultes parce l’enfant est un autre. Cette thèse m’a beaucoup parlé.